La réalité que je connais en tant que prêtre, citoyen, curé de paroisse,
aumônier de prison, acteur de l’accueil de migrants, aumônier des prostituées,
familier des gens de la rue et occasionnel
voyageur sous d’autres cieux, celle que vivent les chrétiens engagés
dans la paroisse ne correspond pas aux discours.
Notre paroisse accueille environ 40 000
passages de personnes par an dans l’église de Château-Thierry, nous accueillons
des festivals et des concerts, nous sommes le lieu « social » de la
plus part des enterrements ; les familles y viennent pour vivre un temps
essentiel de leur vie, y pleurer et chercher consolation, par ailleurs, nombre
de familles y présentent leurs enfants au baptême et viennent encore s’y marier
pour un engagement fort Il est à noter
que l’ église ne dispose pas d’une toilette ni d’un accès pour handicapés
approprié. De fait, nous sommes un lieu hautement social.
Lorsque nous posons des signes publics d’expression de nos
valeurs chrétiennes et de notre foi (crèche
vivantes, procession des rameaux) nous sommes applaudis par le public et
encouragés par les autorités dans le cadre de l’application de la loi de 1905.
Ainsi, je me demande parfois pourquoi, lors des vœux
municipaux de début d’année, tous les corps constitués, la moindre association,
sont salués mais l’église et les religions ne sont pas mentionnées.
Nous vivons dans une culture dont les codes sont
essentiellement chrétiens. Je vis au quotidien une relation forte avec beaucoup
de monde en tant qu’homme d’Eglise. Or, officiellement je n’existe pas. Sur ma
déclaration d’impôts ou toute autre démarche administrative, ma catégorie
professionnelle n’existe pas !
Tout cela, semble-t-il, est un déni de la dimension
religieuse de la culture.. Dit autrement, ne pas considérer les religions comme
constitutives de la réalité de la vie des gens est artificiel ou «un prêt à
penser »réducteur. Notre société fabrique-elle des déracinés dans leur
propre culture ? C’est certainement le creuset d’une dévitalisation qui
conduit à la désespérance. Les jeunes en sont les premiers concernés. De cela nous
sommes des témoins quotidiens. Il est mensonger de prétendre que tout peut être
résolu, acheté, créé par une invention permanente et orgueilleuse et donc
épuisante, et que les loisirs comblent la vie.
D’aucuns vont jusqu’à dire que le fruit est mûr pour se
laisser prendre par n’importe quelle propagande, surtout si elle semble ferme et donner du sens comme l’Islam radical ou n’importe
quel gourou zélé. La soumission serait indolore car le sens commun est endormi,
la mémoire éteinte, Dieu absent.
Nos sociétés ont été
construites sur le modèle chrétien de « Dieu créa l’homme à son image et à
sa ressemblance et homme et femme il les fit à son image et à sa
ressemblance »(livre de la Genèse) Tout vient de là. Là est la source du
droit, de la liberté, de la justesse et de l’humilité nécessaire pour penser. A
partir de là, l’accueil d’autres cultures et d’autres religions est plus assuré
et mieux vécu. Plusieurs générations ont pris pouvoir sur Dieu pour se faire
dieux à la place de Dieu. Dieu est mort disent-ils. Mon orgueil peut enfin
donner libre cours à ses excès. Le surhomme est né. La pensée unique s’impose
car l’individu est dompté.
Face à cela,
Jésus trouvera-t-il la foi quand il reviendra. Trouvera –t-il des enfants de Dieu vivant la véritable
liberté ?
+ Edouard DUCAMPS, curé
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