L’évolution des circonscriptions administratives et religieuses de l’actuel arrondissement de Château-Thierry, de l’Ancien Régime à nos jours.
Xavier de Massary vice-président de la SHACT, inspecteur des patrimoines,collège inventaire général du patrimoine culturel au Ministère de la culture et de la Communication.Ils bougent si rarement qu’ils nous semblent éternels ! Et pourtant, les cadres de notre vie politique et administrative que sont les communes, les cantons, l’arrondissement, et, au-dessus d’eux car les englobant, le Département et la Région n’ont pas toujours existé : la plupart sont nés de la Révolution française et leurs contours ont parfois à leur naissance été âprement discutés.
Depuis une trentaine d’années, l’émergence des pays, des communautés de communes ou d’agglomérations rendent caduques certains de ces cadres, à commencer par les cantons qui sont redevenus depuis 2015 ce qu’ils étaient à l’origine : de simples circonscriptions électorales, aux contours uniquement dictés par le chiffre de leur population, et non plus les bassins de vie que beaucoup ont été pour de nombreuses générations…
Au même moment, l’arrondissement de Château-Thierry qui, depuis 1800, n’était passé que de 127 à 123 communes, conséquence de rares fusions et d’une annexion : la commune de Loupeigne, prise en 1924 à l’arrondissement voisin de Soissons, a perdu d’un coup en 2016 dix communes du Nord-Ouest de son territoire, passées, avec La Ferté-Milon, à l’arrondissement de Soissons pour pouvoir rejoindre la communauté de communes de Retz-en-Valois et cinq autres au sud de la Marne par la fusion de quatre et trois communes devenues Vallées en Champagne et Dhuys-et-Morin-en-Brie
Cette évolution récente de circonscriptions qui, durant deux siècles, n’avaient quasiment pas bougé invite à regarder en arrière pour nous demander s’il existe des liens, et lesquels, entre les cadres territoriaux qui nous sont si familiers et ceux qui les ont précédés, qu’ils soient religieux : paroisses et diocèse, féodaux : comté de Champagne et duché de Valois, judiciaires : baillage et présidial, administratifs enfin, avec les intendants et leurs subdélégués, ancêtres des préfets et sous-préfets. Le plus frappant, à l’issue de ce survol, est sans doute la résilience de la cellule de base de nos territoires majoritairement ruraux qu’est la commune, qu’on appelait paroisse avant 1789 car la dimension religieuse était alors primordiale : c’est autour de l’église et de son cimetière que les hameaux isolés de quelques maisons se sont semble-t-il agglomérés en un temps assez bref (un à deux siècles tout de même : les XIe et XIIe, soit d’Hugues Capet à Philippe-Auguste). A une ou deux exceptions près peut-être, tous les villages du sud de l’Aisne et donc les paroisses puis les communes qui en représentent la communauté d’habitants existaient déjà à l’époque de Saint Louis. Cela représente près de huit siècles, soit trente à quarantaine générations !
La carte ci-contre montre qu’avant la Révolution le diocèse de Soissons longeait la vallée du Petit-Morin plus à l’ouest que la limite départementale aujourd’hui, englobait Montmirail et le plateau boisé jusqu’à la Côte des Blancs puis traversait la Marne juste en aval d’Epernay pour se confondre avec l’actuelle limite départementale à Villers-Agron. Quant aux limites du baillage de Château-Thierry, circonscription judiciaire qui servit aussi pour la convocation aux Etats-Généraux de 1789, elle épouse à peu près les limites de l’arrondissement actuel, avec une pointe au sud-est pour englober la haute vallée du Surmelin, mais sans la vallée de l’Orillon dans le Tardenois ni, au nord, quelques villages le long de l’Ourcq ni les bourgs de Fère-en-Tardenois ou de Neuilly-Saint-Front.Xavier de Massary
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